Municipales à Paris et dans le 15ème - Notre analyse actualisée après le 2nd tour
Municipales à Paris et dans le 15ème. L’indifférence électorale ne doit pas masquer la profonde volonté de rupture.
PCF Paris 15, 28 mars 2014, revu le 18 avril 2014
Les élections municipales n’ont pas réservé de surprise à Paris. Anne Hidalgo a été élue maire de Paris et Philippe Goujon s’est succédé à lui-même dans le 15ème. La rupture avec la politique « social-libérale », n’est pas pour maintenant à Paris, du moins à l’Hôtel de Ville. Dans un communiqué, Hidalgo vient de féliciter Valls pour sa déclaration de politique générale et d’annoncer qu’elle inscrirait son action parisienne sur ses pas.
Les tendances électorales nationales – sanction de la gauche, montée de l’abstention, vote déversoir sur le FN – ont été atténuées dans la capitale.
Les caractéristiques de l’électorat parisien l’expliquent en partie.
Une large frange des Parisiens est nettement plus riche que la moyenne nationale, moins sujette à la colère sociale, plus adhérente à l’idéologie dominante, plus sensible aussi aux questions de société. Les Parisiens les plus pauvres sont plus souvent exclus du droit de vote et imperméables au discours anti-immigrés du FN.
Il est à noter aussi que plus du tiers des habitants majeurs n’est pas inscrit sur les listes électorales de la ville (étrangers, inscrits en province, non-inscrits volontaires ou non…): 640.000 sur 1.880.000. Avec l’abstention, cela fait que moins d’un Parisien majeur sur 8 a voté pour les listes Hidalgo au 1er tour. Comme dans les autres grandes villes et en banlieue, le suffrage « universel » l’est de moins en moins. Il y a crise démocratique. Tous les résultats sont à relativiser.
La campagne électorale a reflété le large consensus entre les principaux candidats sur les questions de fond, aussi bien nationales que locales, étouffant la contradiction, même le débat public, avec toute force portant quelque alternative.
De toutes les communes, la capitale est celle où la situation politique s’apparente le plus à la situation nationale. Delanoë et Hidalgo n’ont pas pu masquer leur proximité immédiate avec Hollande qui poursuit la politique de Sarkozy.
Les programmes et les discours creux d’Hidalgo et NKM se sont révélés presque interchangeables comme leurs équipes. On ne compte plus les ralliements venant du Modem ou de l’UMP à Hidalgo, le dernier en date, après le 1er tour, celui de la tête de liste UMP dans le 18ème en 2008, Roxane Descorte. Dans le 15ème, c’est la caricature : l’ex-ministre UMP, Dominique Versini, figurait en 3ème position derrière Hidalgo pendant que l’ex secrétaire général des Verts et partenaire de l’union de la gauche, Yann Werling, était en 4ème position derrière l’UMP Goujon.
Aussi, le niveau de l’abstention n’est pas étonnant : 43,7%, bien plus que la moyenne nationale (même s’il augmente moins fortement à Paris, + 0,7%). Dans le 15ème, la participation a augmenté de 2% sans doute à cause de la médiatisation d’Hidalgo.
Dans ce contexte, les mouvements de voix entre 2008 et 2014 ont été de faible ampleur au 1er tour, ce qui a permis aux deux camps principaux de crier victoire, alors qu’en réalité, les deux sont sanctionnés.
Au second tour, le vote sanction s’est davantage manifesté avec un net report des voix FN sur la droite. Mais au final, seul le 9ème arrondissement bascule à droite alors que le 5ème a manqué de peu de basculer « à gauche ».
La droite rassemblée de NKM est arrivée en tête au 1er tour, certes, mais c’est à la faveur de son union. En fait, elle perd, avec 35,6%, près de 2% et 10.000 voix sur le total UMP+Modem de 2008. Les dissidents et divers droite restent au même niveau : 5%. La droite ne se relève pas du vote sanction qui l’a frappé en 2008, pas plus à Paris qu’ailleurs, malgré l’illusion d’optique.
De leur côté en effet, les listes issues de la majorité de « gauche » sortante, prises ensemble, ont peu reculé sur 2008 (48%). Mais avec 34,4%, les listes Hidalgo ont été devancées. Elles ont endossé le vote sanction contre la politique du gouvernement, mais sont arrivées à drainer des voix de droite qui l’ont compensé.
Les listes EELV et PG-FdG ont bien joué leur rôle de matelas d’amortissement et de forces d’appoint.
Le résultat des écologistes, en hausse de 2% à 8,8%, provient sans doute en partie de leur position critique – la seule dans la majorité sortante – à l’égard de la politique d’urbanisme d’Hidalgo qu’ils ont ralliée cependant aussitôt. Ils ont certainement profité – dans le fond on ne voit pas pourquoi - du nuage de particules fines qui a empesté Paris avant le scrutin. Dans la capitale, il se trouve aussi une population qui a les moyens d’habiter assez près de son travail pour s’y rendre à bicyclette et d’avoir comme préoccupation prioritaire un aéroport situé à 400 kilomètres...
Le PG de Mme Simonnet et M. Corbière, élus PS en 2001 et 2008, a réussi à canaliser, sur un mode gauchisant, certains déçus de Hollande, tout en recyclant la majeure partie des voix du NPA de 2008. Avec 5%, leur résultat est conforme aux prévisions des sondages pour le Front de gauche (mené par le PG ou par le PCF).
Ils ne seront même pas récompensés en sièges d’avoir occupé « l’espace politique » à gauche du PS. Leurs anciens camarades du PS et du Front de gauche les ont éconduits des fusions de liste, après qu’ils ont pourtant appelé à « battre la droite ». Les règlements de compte entre anciens du PS et de l’UNEF, l’avidité de sièges de ceux qui n’ont pas osé se présenter devant les électeurs donnent une image déplorable. Sans aucune sympathie politique pour les dirigeants du FdG et leur démarche, nous comprenons la colère de leurs électeurs. L’avenir de l’attelage bâtard du Front de gauche est plus que jamais posé.
La stratégie « arc-en-ciel » de l’équipe Hidalgo – large ouverture vers le bleu (UMP) et le jaune (Modem), caution « rouge » avec les directions du PCF – a bien fonctionné. Le choix de la collaboration payé: Mme Versini (ex-UMP), M. Martins (ex-Modem), M. Brossat (PCF) sont promus adjoints au maire de Paris, les directions du PCF, choyées, gagnent 5 postes de conseillers de Paris.
Cette stratégie a moins bien fonctionné dans le 15ème. Avec Versini, l’ouverture à droite était peut-être trop caricaturale et l’illusion de « gauche » de sa politique y était aussi plus difficile à défendre. Les choix favorisant la spéculation dans le 15ème (Beaugrenelle avec la vente du centre commercial en pleine campagne, la Porte de Versailles etc.), son rejet hautain des revendications sociales du mouvement associatif ont pesé. Malgré son nouveau statut, Hidalgo, tête de liste dans l’arrondissement, enregistre le plus lourd recul de la « gauche » à Paris. Au second tour, Hidalgo passe de 47,4% en 2008 à 36,6% en 2014 ! Elle perd même 5% sur 2001. La « gauche » perd deux de ses cinq sièges de conseillers de Paris dans le 15ème. Elle ne l’emporte – de justesse - que dans 2 bureaux de vote sur 85 (Frères Voisins, rue de Cherbourg). La gravité électorale pour la gauche (sans guillemets) de la politique social-libérale s’est beaucoup plus fait sentir qu’ailleurs à Paris.
A Paris, la progression du FN est très inférieure à celle constatée dans les autres grandes villes et villes moyennes. Il passe quand même de 3,2% en 2008 à 6,3% en 2014, soit un gain de 20.000 voix. A Paris, le système a moins besoin du FN que dans le reste du pays pour que rien ne change.
C’est bien l’enseignement principal de ces élections sans surprise : Elles ne vont rien changer. Aucune condition politique pour le changement, pour l’expression même d’une rupture avec la politique du capital, ne pouvait pointer lors de ce scrutin.
Conscients de cette réalité, communistes de la section du PCF du 15ème arrondissement, nous avons concentré notre action, pendant la campagne électorale, sur la mobilisation contre le « Pacte de responsabilité », avec l’heureuse manifestation du 18 mars, et sur des sujets parisiens locaux précis : la santé (Hôtel-Dieu, défense des centres de santé), le logement, les équipements publics etc. Notre objectif est de renforcer les luttes pour dès après les élections.
Nous avons dénoncé la décision de la direction du PCF Paris de rallier dès le 1er tour les listes Hidalgo contre un certain nombre de places, et contesté les conditions biaisées du vote interne de ratification.
Ce choix, médiatisé nationalement, a lourdement plombé les candidats communistes en banlieue et dans toute la France, les associant au PS dans le vote sanction.
Nous vérifions aujourd’hui à quel point il aura des conséquences lourdes pour la crédibilité de notre Parti, les luttes initiées ou relayées par les communistes, dans les quartiers et les entreprises.
Les bonnes places octroyées par Hidalgo, sans avoir à coup férir, sur la base de l’alignement sur son programme social-libéral, préparent une satellisation accrue au PS. Hidalgo a rejeté la fusion avec le PG parce qu’il ne s’engageait pas à voter les budgets des six prochaines années. Les élus PCF ont donc fait cet acte de soumission !
Certains arguments fallacieux, hypocrites risquent de se retourner contre tous les communistes. Nous ne laisserons pas faire.
On ne peut pas prétendre soutenir les urgences de l’Hôtel-Dieu, le projet de reconstitution de l’hôpital sans dénoncer Hidalgo et son colistier à la santé Le Guen (devenu ministre), sans dénoncer le nouveau directeur général de l’AP-HP Hirsch, ex-ministre de Sarkozy, nommé par la « gauche ». Ils portent le projet de casse.
Des affiches incroyables « contre la spéculation immobilière, votez Hidalgo » ont été produites par des candidats PCF. Nous sommes outrés par ce que nous espérons être de l’ignorance et non de la duplicité. Le promoteur Gecina, champion des ventes à la découpe, empoche 300 millions d’euros de plus-value à Beaugrenelle, en pleine campagne électorale, grâce à Hidalgo ! Pourquoi pas une affiche : « mieux vaut une spéculation de gauche que de droite » ?
Les habitants et travailleurs du 15ème arrondissement peuvent continuer à compter sur l’action des communistes de la section du PCF Paris 15ème pour rassembler et défendre leurs intérêts face aux puissances d’argent, face à leurs valets.
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